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27 avril 2011 3 27 /04 /avril /2011 09:10

visuel-sarlat-2011TNDu lundi 18 juillet au vendredi 5 août 2011 aura lieu le soixantième festival des jeux du théâtre de Sarlat.

Voilà une de ces échéances décimales que l’on aime à célébrer. On la pressentait; elle approchait... et déjà en 2010 la question avait été posée aux organisateurs: "Comment allez-vous marquer le coup?" À quoi il avait été répondu que rien n’était encore décidé mais qu’il était à peu près certain qu’il n’y aurait pas de grosses dépenses exceptionnelles – les contraintes budgétaires sont telles que, pour faire briller plus haut une soixantième édition, il aurait fallu restreindre les moyens consentis aux autres éditions, et cela n’était satisfaisant pour personne. C’est un sacré défi que de vouloir commémorer un anniversaire, mais sans être dispendieux ni avoir l’air de déshabiller Pierre et Paul pour offrir à Jacques de la soie… La conférence de presse qui s’est tenue le 11 avril dernier laisse supposer que le gant sera relevé avec talent et intelligence.


Il n’y aura pas de feux d’artifices ni de fêtes somptuaires, mais une exposition retraçant l’histoire du festival qui occupera la salle du Peyrou du 15 juillet au 4 août, et l’on s’apprête à publier un livret spécial compilant documents et photos glanés auprès de témoins de tous ordres qui ont suivi le festival d’année en année. Quant au programme… Chaque année il fait de son mieux pour qu’il soit attrayant et il ne croyait pas possible de "faire mieux que mieux". Pourtant si, Jean-Paul Tribout, directeur artistique chargé de la programmation, a fait encore mieux que de coutume, justement en ne se départant d’aucun des principes qui fondent l’esprit du festival et en composant son "menu" comme il en a l’habitude quand les circonstances invitaient à tomber dans l’ostentatoire… Ainsi a-t-il concocté une "assiette" plus sarladaise que jamais, toute brillante de cet enthousiasme déployé pour réunir en un chœur harmonieux vedettes et artistes moins connus, pièces fameuses et textes oubliés, auteurs contemporains et stars classiques, grands spectacles et petites formes, théâtre pur et théâtre musical, metteurs en scène pondérés dans leurs approches et d'autres beaucoup plus audacieux...


Le programme est déjà en ligne sur le site du festival. Je me bornerai ici à ajouter pour chacun des vingt et un spectacles à l'affiche, outre quelques commentaires qui pourraient me venir à l'idée, ce petit zeste apéritif que leur a donné Jean-Paul Tribout en ayant toujours à portée de phrase l’anecdote ou le mot qui personnalise une présentation – et sauf indication spéciale, toutes les citations lui sont empruntées…


Lundi 18 juillet. Jardin des Enfeus
Au moment de la nuit. D’après La Nuit et le moment de Crébillon Fils, et Le Pain de ménage, de Jules Renard. Mise en scène par Nicolas Briançon.
Chacun de ces textes aborde, à sa façon, la question de la relation de couple. Nicolas Briançon a imaginé que les deux personnages en train de se livrer aux jeux de la séduction dans la pièce de Crébillon Fils étaient les mêmes que ceux du Pain de ménage, quelques années plus tard. Ils se sont mariés chacun de leur côté et se retrouvent par hasard pendant les vacances tandis que leurs conjoints respectifs sont ailleurs… Pour improbable qu’elle puisse paraître, cette fusion entre des textes émanant d’auteurs aussi différents, et éloignés dans le temps, fonctionne paraît-il à merveille – dixit Jean-Paul Tribout…


Mardi 19 juillet. Abbaye Sainte-Claire
La Dame au petit chien. Texte de Claude Merle, d’après Anton Tchekhov. Mise en scène d’Anne Bouvier.
Question de séduction encore avec cette adaptation théâtrale d’une nouvelle de Tchekhov où, dans une station balnéaire, un homme et une femme entament par jeu une liaison amoureuse qui évolue en passion. Gaëlle Merle est Anna, mariée à un homme qu’elle n’aime pas, Jean-Pierre Bouvier est Dimitri, riche banquier passionné d’opéra et séducteur impénitent.
Au vu de la distribution, un vieux souvenir remonte... Jean-Pierre Bouvier en visite au collège où je terminais ma troisième, après une représentation de Ruy Blas. Il y tenait le rôle-titre. Le ver de terre amoureux d’une étoile (V. Hugo) avait admirablement parlé et de la pièce, et de son travail de comédien. Sa conviction et sa présence avaient su capter l’attention de toute une classe…

 

Mercredi 20 juillet. Place de la Liberté
Éclats de vie. D'après des textes d'auteurs classiques et contemporains. Mise en scène et interprétation: Jacques Weber.

L'on voit régulièrement à Sarlat des comédiens se risquant seuls en scène pour interpréter des textes non théâtraux puisés à diverses époques et montés en mosaïque – je me souviens en particulier de Jean-Marie Sirgue qui a joué Les Konkasseurs de kakao l’an dernier, et de Pierre Lafont qui, en 2007, se faisait guider par les demandes des spectateurs pour établir son florilège textuel. Spectacles intimistes par excellence n’exigeant pas de dispositif scénique très lourd, ces pièces, que goûte surtout un public d’amateurs avertis, sont idéales pour des espaces à petite jauge comme la cour de l’abbaye Sainte-Claire. C’est pourtant sur la grande scène de la place de la Liberté que seront joués ces Éclats de vie, un spectacle que Jacques Weber a créé voici quarante ans et qu’il améliore, qu’il travaille, qu’il recrée sans cesse depuis… Le pari est sans doute osé que de compter sur un "seul-en-scène" pour remplir des gradins capables d’accueillir 1200 personnes… Mais cela avait très bien fonctionné l’an dernier – le public s’était pressé pour aller voir Francis Huster interpréter sa version de La Traversée de Paris, de Marcel Aymé – et le pari sera probablement gagné à nouveau cette année car la notoriété de Jacques Weber, à l’instar de celle de Francis Huster, s’étend bien au-delà du cercle des seuls habitués des théâtres. Et puis il y a son talent particulier, son rapport exceptionnel à la langue française… À coup sûr les spectateurs seront très nombreux…

 

MmeRaymonde_TN.jpgJeudi 21 juillet. Jardin des Enfeus
Madame Raymonde exagère. Texte et mise en scène de Philippe Bilheur et Denis d'Arcangelo.

Madame Raymonde est une femme assez spéciale – c’est, en, fait, un monsieur… Entendez par là un personnage incarné par Denis d’Arcangelo et que Jean-Paul Tribout situe entre Betty Boop et Pauline Carton… voilà ce qui s’appelle trouver les mots pour éveiller sinon l’intérêt immédiat du moins la plus grande curiosité. Si l’on ajoute que le spectacle a été inspiré à ses auteurs par une rencontre avec Arletty, l’appât est complet…


Vendredi 22 juillet – Place de la Liberté
La Comédie des erreurs. Texte de William Shakespeare, mise en scène de Dan Jemmett.
L’on avait été privé de Shakespeare l’an dernier par un violent orage qui avait eu la très mauvaise idée d’éclater juste avant la représentation de La Nuit des rois et de ne pas se calmer assez tôt pour permettre malgré tout aux comédiens de jouer. Le souvenir un peu amer de cet incident a peut-être sa part dans le désir qu’a eu Jean-Paul Tribout de réinscrire très vite le nom de Shakespeare au programme mais, cette fois, par le biais d’une pièce bien moins connue que La Nuit des rois. La Comédie des erreurs repose sur un thème souvent exploité par le théâtre depuis l’Antiquité: les confusions et quiproquos provoqués par la gémellité. Déjà emplie de fantaisie par son auteur, nul doute que, montée par Dan Jemmett – metteur en scène anglais désormais installé en France et réputé pour être le grand déconstructeur de Shakespeare (Aurélien Ferenczi dans un article paru sur le site de Télérama)
la pièce va certainement décoiffer, et pas qu’un peu…

Samedi 23 juillet. Jardin des Enfeus
L’Or. D’après Blaise Cendrars, mise en scène de Xavier Simonin.
Son nom n’apparaît pas, mais sa patte y est: Jean-Paul Tribout a participé au montage de ce spectacle; d’ailleurs Xavier Simonin est l’un de ses compagnons de route, que l’on avait vu dans Nekrassov puis dans Donogoo. On retrouve également l’harmoniciste Jean-Jacques Milteau – l’harmonica, instrument emblématique de la ruée vers l’or, s’imposait pour accompagner musicalement l’histoire de Johan August Suter, qui a quitté sa famille pour aller faire fortune en Californie…


Dimanche 24 juillet – Place de la Liberté
Don Juan. Texte de Molière, mise en scène de Francis Huster.
Ce Don Juan-là commence en 1951, en Avignon: Jean Vilar et ses comédiens apprennent par la radio que Louis Jouvet vient de mourir. Ils décident alors de monter son Don Juan. Cette pièce, qui sera donc un emboîtement de mises en abyme, n’est pas encore un spectacle abouti quand a lieu la conférence de presse; il est en cours de préparation et la distribution n’est pas arrêtée. Par là elle est emblématique de la démarche du comité organisateur qui, faute d’avoir suffisamment de moyens pour produire des spectacles, montre son courage et sa volonté de soutenir les artistes en prenant chaque année le risque d’inviter des pièces en cours de montage. Certes, on a là un auteur vedette, un texte vedette, un comédien-metteur en scène vedette qui coiffera ses deux casquettes pour rendre hommage à deux monstres sacrés du théâtre français – Louis Jouvet et Jean Vilar – et l’on pensera que la prise de risque est tout de même minime. Mais il ne faut pas oublier qu’en matière de spectacle vivant, rien n’est jamais assuré et qu’un cumul de grands noms ne garantit ni une qualité optimale, ni un engouement du public…


laboetie_TN.jpgLundi 25 juillet. Abbaye Sainte-Claire
Discours de la servitude volontaire. Texte d’Étienne de la Boëtie, mis en scène par Stéphane Verrue.
Ce discours a été écrit aux environs de 1546. Il résonne continument à travers les siècles, comme tous les textes fondateurs de la pensée, ou de la sensibilité qui, quelle que soit leur ancienneté, demeurent de tous temps intelligibles et porteurs de sens. La lumière qu’il jette aujourd’hui sur l’état de la pensée et de la réflexion en France justifie pleinement qu’un homme de théâtre s’en soit emparé pour l’adapter à la scène. Et comme son auteur est natif de Sarlat, mettre ce spectacle à l’affiche s’imposait… plus que jamais cette année où le soixantième anniversaire du festival incline à saluer un peu plus bas que d'habitude la ville qui est son berceau à travers l’une de ses grandes figures littéraires.

 

Mardi 26 juillet. Jardin des Enfeus
Derniers remords avant l’oubli. Texte de Jean-Luc Lagarce, mise en scène de Julie Deliquet.
Jean-Luc Lagarce,
mort prématurément du SIDAcompte aujourd’hui parmi les auteurs contemporains les plus joués en France. Il a écrit ce texte en 1989. On y sent néanmoins l’empreinte d’un esprit que l’on associe généralement à la grande époque contestataire de Mai 68 – cette tendance qu’ont certains à tenter l’aventure d’un mode de vie en marge des conventions qui régissent la société moderne. La pièce se situe à la campagne, dans une ferme qu’un trio d’amis – une femme et deux hommes – avait achetée plusieurs années auparavant pour y vivre ensemble. Vint un moment où le groupe a éclaté. Un seul des trois est resté à la ferme, les deux autres sont partis et ont fondé une famille chacun de leur côté. Puis ceux qui sont partis reviennent: il faut vendre cette maison acquise en commun. Est-ce "rentrer dans le rang" que de remettre ainsi en question ses choix passés? C’est, en tout cas, faire le deuil de ses rêves de jeunesse, estime Jean-Paul Tribout. C’est une pièce qui nous concerne tous et qui, personnellement, me touche beaucoup… conclut-il avant de souligner la qualité de jeu des comédiens.

 

Mercredi 27 juillet. Abbaye Sainte-Claire
Jupe courte et conséquences. Texte et mise en scène d’Hervé Devolder.
Sans doute est-ce là une de ces petites perles, discrètes et que l’on n’attend ni par son titre ni par le nom de son auteur ou de ses interprètes, qui émaillent toujours l’affiche du festival sarladais; une de ces pièces vers laquelle on n’irait pas spontanément mais qui, ainsi offerte, tente indiciblement et que l’on est enchanté, en quittant sa place, d’avoir découverte. D’ailleurs le directeur artistique dit avoir été très agréablement surpris par ce très joli spectacle et en être sorti comme s’il avait dégusté une coupe de champagne… À partir du regard que pose un monsieur sur la jupe d’une jeune femme qui passe commence une sorte de jeu, nullement libidineux ni machiste mais relevant des virevoltes de la séduction – thème omniprésent cette année semble-t-il…

 

Cap-fracasse-long-TN.jpg


Jeudi 28 juillet. Jardin des Enfeus
Il capitano Fracasse. D’après Théophile Gautier, texte et mise en scène de Jean-Renaud Garcia.
À partir du roman célébrissime de Théophile Gautier, Jean-Renaud Garcia a écrit une adaptation en vers, qu’il met en scène avec chants et musique – jouée avec des instruments du XVIIe siècle. Ce réjouissant divertissement de cape et d’épée, qui sera véritablement "chez lui" à Sarlat et dont diverses versions parcourent l’histoire du festival, sera créé le 24 mai prochain au Théâtre 14 Jean-Marie Serreau (20 avenue Marc Sangnier - 75014 Paris. Contact réservation: 01.45.45.49.77). Le spectacle a son site, au bout de ce lien.

 

Vendredi 29 juillet. Centre culturel, salle Paul Eluard
Mot à mot. Spectacle jeune public écrit par Anne Kellen et mis en scène par Jean-Daniel Laval.
L’on voit tous les ans des spectacles "tout public", accessibles aux enfants autant qu’attrayant pour les adultes – par exemple les pièces de tréteaux jouées au Jardin du Plantier, auxquelles s’ajoutent des adaptations scéniques de grands classiques comme Le Tour du monde en 80 jours ou Les Voyages de Gulliver. Mais il y avait plusieurs années que les tout-petits n’avaient pas eu un moment théâtral qui leur fût particulièrement destiné. Avec Mot à mot, un spectacle à la fois amusant et intelligent qui travaille sur le mot et l’image qui dure moins d’une heure de façon à être visible par des enfants à partir de 3 ans, le comité du festival renoue avec cette heureuse tradition et contribue ainsi à faire naître chez les spectateurs de demain de belles envies de théâtre. Le centre culturel, après de longs travaux, est à nouveau disponible; cela permet d’offrir deux spectacles le même jour – celui-ci proposé à 17 heures, et un second en soirée, cette fois pour les adultes…

 

celine_TN.jpgVendredi 29 juillet. Abbaye Sainte-Claire.
Dieu, qu’ils étaient lourds! D’après Louis-Ferdinand Céline. Mise en scène de Ludovic Longelin.
Programmer un texte de Céline, l’un des auteurs français les plus controversés
au point que Frédéric Mitterrand a dû retirer son nom de la liste des pesonnalités dont on allait en 2011 commémorer l’un ou l’autre anniversaire – n’a pas été sans poser des difficultés… Je comprends que cela puisse choquer certaines personnes, explique Jean-Paul Tribout. Car le moins qu’on puisse dire est que politiquement, Céline a été une véritable ordure à certains moments. Mais en dépit de ses actes et attitudes les plus révoltants, il reste un écrivain qui a révolutionné la littérature. C’est finalement cette dimension-là du personnage qui l’a emporté: on verra donc à Sarlat une pièce tirée d’un des derniers textes de Céline, Les Entretiens avec le professeur Y. dans lequel il évoque ce que sont pour lui l’art, l'écriture, les écrivains...

 

Samedi 30 juillet. Jardin des Enfeus
Les Femmes savantes. Texte de Molière, mise en scène d’Armand Delcampe.
Nous voilà de retour chez les classiques, tant au niveau de l’auteur et du texte, que du metteur en scène – j’écris cela en songeant au travail qu’il avait réalisé sur un autre grand classique moliéresque, Tartuffe ou l’imposteur, vu l’an dernier à Sarlat, et je ne crois pas qu’il y ait à redouter un spectacle par trop déconcertant à force d’outrances et de prétentions au modernisme. Quant à la pièce elle-même, j’ai encore toute fraîche à l’esprit la version qu’en avaient donnée Arnaud Denis et les Compagnons de la Chimère, et je suis très curieuse de lui confronter celle d'Armand Delcampe…

 

Dimanche 31 juillet. Abbaye Sainte-Claire
Journée SACD. Deux spectacles entrecoupés par la conviviale Assiette périgourdine avec un seul billet.
À 18 heures, Bruno Tuchzer interprète sa propre adaptation d’Une mort moderne: une conférence du Dr Storm, un texte de l’auteur suédois Carl Henning Wijkmark qui traite, de manière corrosive, des rapports entre le monde politique et celui de la santé. Dans cette conférence, le Dr Storm se propose de résoudre de nombreux problèmes, et ceux qui se posent en France actuellement – comment combler le trou de la Sécurité sociale, favoriser l’emploi des jeunes, régler les problèmes de la dépendance… - y trouvent paraît-il leur solution. On comprend pourquoi le comité du festival a eu envie de programmer cette lecture…
À 21 heures, David Lescot, dramaturge, comédien et musicien, interprète un de ses textes intitulé La Commission centrale de l’enfance, écrit en souvenir des vacances d’été qu’il a passées dans les colonies estivales mises en place sous cette appellation par les organisations juives communistes de France après la Seconde Guerre mondiale.


affiche_Che-TN.jpgLundi 1er août. Jardin des Enfeus
Le Crépuscule du Che. Texte de José Pablo Feinmann, mis en scène par Gérard Gelas.
La situation dramatique est, de prime abord, quasi fantastique puisque l’argument de la pièce est un face-à-face entre Che Guevara en train de vivre ses dernières heures en octobre 1967 – il va être exécuté au matin – et un journaliste d’aujourd’hui qui est venu l’interroger avec, en tête, tout ce que légende, mythification et médiatisation ont construit autour de lui. Il ressort de cette étrange confrontation un regard inédit sur un personnage charismatique et une réflexion sur ce qu’est une révolution, pourquoi elle échoue… Toutes questions qui demeurent intemporelles.
Le spectacle a été créé en 2009 au théâtre du Chêne noir à Avignon.

 

 

Mardi 2 août. Abbaye Saint-Claire
Don Juan. Texte de Molière, mis en scène et interprété par Laurent Rogero.

De la place de la Liberté à l’abbaye Sainte Claire, des mains du metteur en scène vedette venu de Paris à celles du jeune artiste installé en Aquitaine – Laurent Rogero et sa compagnie, le groupe Anamorphose sont basés à Bordeaux: la pièce de Molière voyage entre deux pôles opposés pour mieux dévoiler aux spectateurs sa richesse et la diversité des appropriations qu’elle permet. En programmant deux versions de Don Juan la même année, le comité du festival invite très clairement les spectateurs à oublier qu’ils "connaissent l’histoire" et qu’ils ont tout à gagner à scruter la façon dont elle est racontée… 

 

Mercredi 3 août. Jardin des Enfeus.
Vol au-dessus d’un nid de coucou. Adaptation de Dale Wasserman d’après un roman de Ken Kesey, mise en scène de Stéphane Daurat.
Au seul énoncé du titre, nous serons nombreux à nous souvenir du film de Milos Forman, devenu culte, avec Jack Nicholson et Louise Fletcher. Nous serons sans doute beaucoup moins nombreux à savoir que le film est tiré d’un roman – le premier que publia l’écrivain américain Ken Kesey (1935-2001), figure importante du mouvement psychédélique – et qu’il y eut, bien avant l’adaptation pour le grand écran, une transposition théâtrale de ce même roman, écrite par Dale Wasserman. C’est elle que met en scène Stéphane Daurat, de la compagnie Caravane: très sensible aux résonnances qu’a aujourd’hui ce texte datant des années 1960, il lui a semblé qu’il était de nature à divertir tout en renvoyant chacun à sa propre histoire, à son expérience et au monde dans lequel il vit. Et s’il a eu envie de monter cette pièce, c’est en songeant qu’elle pouvait nous inciter à lutter contre toute forme d’oppression par l’énergie libératrice qui s’en dégage (propos adaptés de la "note d’intention" de Stéphane Daurat, publiée sur cette page du site de la compagnie Caravane).

 

cabaretastro_TN.jpgJeudi 4 août. Jardin du Plantier
Cabaret Astroburlesque. Écrit et conçu par Dominique Paquet et Patrick Simon, mis en scène par Patrick Simon.
Avec ce spectacle s’opère une petite plongée dans l’histoire du festival: Dominique Paquet est la fille de Raymond Paquet, un des premiers metteurs en scène invités à Sarlat – il a présenté, en 1953, un Impromptu de Sarlat, d’après Molière. De plus, Dominique Paquet et sa compagnie, le groupe 3.5.81, sont des habitués du festival – ils ont récemment régalé les festivaliers avec Au bout de la plage, le Banquet en 2006 et Le Ventre des philosophes en 2008. Et puis la pièce, créée à l’occasion de la Fête de la science et mêlant chant, danse, mosaïque textuelle… est emblématique des grands principes qui guident les organisateurs: mêler les genres, et instruire le public tout en l’amusant. Jouée au Plantier, elle incarnera cette année la tradition sarladaise qui épingle tous les ans à son programme un spectacle de tréteaux.


Vendredi 5 août. Jardin des Enfeus
Fatrasie ou la fabuleuse histoire de Louis Leroy. Écrit et mis en scène par Pierre Leriq.
Pierre Leriq est un artiste au parcours un peu particulier, qui fait maintenant du théâtre… électro-rock… Pareille présentation faisant suite à une brève explication de ce qu’est la fatrasie, on se doute que le spectacle doit en effet être un joyeux fatras – il faut imaginer la musique d’Erik Satie associée à un défilé de majorettes… Jean-Paul Tribout, en disant de cette Fatrasie qu'elle est déjantée, jouée avec une énergie magnifique, nous convainc d’avance de l’inscrire dans notre "carnet de festival", histoire d’être sûrs de quitter ces trois semaines flamboyantes dans la joie et l’humeur allègre, point trop tristes de voir le rideau tomber jusqu’à l’été suivant…  

 

Voilà, le programme est dressé. Sur le papier, tout est parfait. Reste à espérer que rien ne vienne empêcher l’un ou l’autre spectacle d’être joué. Que la billetterie affiche très souvent "complet". Et que le calendrier des comédiens et compagnies invités soit assez clément pour qu’aucune réunion de Plamon ne se tienne in absentia… Car ces rendez-vous matinaux sont des moments privilégiés d’échanges et l’on est toujours un peu triste, un peu déçu lorsqu’en arrivant Jean-Paul Tribout annonce que, pour cause de présence requise en d’autres lieux les comédiens du spectacle donné la veille ne viendront pas et que ceux de la pièce du soir, contraints d’arriver sur le tard dans la journée, seront eux aussi absents. Il est ainsi arrivé quelquefois au directeur artistique de se retrouver seul maître de cérémonie. Mais cela n’a jamais nui à la qualité des réunions plamonaises: quelles que soient les circonstances et les difficultés, Jean-Paul Tribout se montre d’un talent égal pour animer les conversations, apporter des informations, distribuer à chacun la parole, piqueter d’humour ses propos et, avec lui, on ne risque pas d’entendre les dialogues jouer les soufflets trop vite sortis du four…


Maintenant, le plus dur est à faire: réfléchir et choisir – pour cela les festivaliers potentiels ont du temps devant eux puisque la location n’ouvrira au public que le lundi 27 juin (les membres actifs de l’association organisatrice bénéficieront, eux, d’une petite longueur d’avance et pourront louer leurs places dès le 22 juin). Mais au fait… pourquoi choisir? Pourquoi ne pas se laisse tenter par un semi-marathon théâtral et voir TOUS les spectacles? Ce serait une belle façon, pour le spectateur amateur, de souffler ces soixante bougies sarladaises et d'adresser aux organisateurs le remerciement qu'ils méritent pour le fabuleux travail qu'ils accomplissent d'une année l'autre…

 

Le président Jacques Leclaire, les membres du Comité et Jean-Paul Tribout ont présenté le programme de la soixantième édition du Festival des jeux du théâtre de Sarlat lors de la conférence de presse qui s’est tenue le lundi 11 avril 2011 à 18 heures à la salle Molière de Sarlat.

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