Plantée au cœur de la nuit
L’insomnie.
Le vaste blanc du sommeil interrompu – sans brutalité, comme cela… avec une douceur de voile qu’on soulève.
Corps délassé, souffle ample, cœur lent... mais de sommeil, point.
Yeux clos, sur le dos, je suis d'une immobilité quasi parfaite que plisse la seule alternance d’inspirations et d’expirations chacune d'elles profondes. Rien qui justifie ce plein éveil et pourtant…
Je suis là étendue, lasse et creusée de raideurs, érodée par ce manque délétère et qui se répète nuit après nuit: le sommeil qui se refuse et dont l’absence me prive de réconfort.
Quel est donc ce ressort secret qui demeure en tension continue, fait par là obstacle à toute paix, physique et mentale? Serait-ce une fissure par où se faufilerait, sûr de sa victoire à moyen terme, l’instinct de mort – le fil ténu d’une pulsion suicidaire longeant les tréfonds obscurs de mes angoisses et les strangulant peu à peu, comparable à l'inclination fatale qui pousse le dipsomane toujours plus avant dans sa quête de l’ivresse jusqu’à ce que mort s’ensuive sans qu’il ait à agir en toute volonté pour se faire disparaître?
Suprême lâcheté que ce suicide passif! mais au fond n’est-ce pas une lâcheté constante qui aura gouverné ma vie – dérobades, préférence donnée aux colères rentrées et lâchées dans les moments de solitude sur les refus clairement dits, les oppositions frontales?