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8 février 2015 7 08 /02 /février /2015 10:47
Coup de gueule

Confrontée à un texte dont bien des propos m'ont mise très en colère, mes pensées ont été - et sont encore jusqu'à un certain point - phagocytées par l'indignation, une volonté de répondre point par point aux allégations qui m'ont tant révoltée. Mais je suffoque, et ces "réponses", d'argumentées, se muent en brouhaha confus qui ne saurait être transcrit ici. Ce blog n'est pas une déchetterie où je verserai toute ma bile. Mais dès lors que je parviens à donner un semblant d'habillage textuel à une préoccupation, un sujet de colère... alors, je saute le pas. Et parmi les sujets dont le traitement m'a fâchée - le traitement, non les sujets en soi: eussent-il été abordés avec moins de mauvaise foi et de "monofocalisations" avérées, jamais je ne me serais emportée comme je l'ai fait intérieurement et durant tant de jours. L'un des bâts qui blessent? Le "transhumanisme". Thème sur lequel je viens de lire une tribune publiée dans Marianne, "Le transhumanisme? Non merci!", signée Thierry Blin. Et qui m'inspire ce qui suit, brut de décoffrage, parce que je crois que la forme un tant soit peu approximative mérite d'être conservée: c'est une transcription assez juste de mon emportement, et c'est lui, plus que mon opinion en définitive, que j'entends fixer par l'écrit...

Comme toujours pour "dénoncer" on ne met en exergue qu'un aspect de la question... En se référant à l'armée, au dictat des multinationales (ah, accroître les performances du soldat, genre "se passer définitivement de sommeil", s'affranchir de tout besoin physiologique qui l'empêcherait de mener sa mission, pouvoir lui laver le cerveau et le programmer pour le réduire à l'état de serviteur absolument obéissant... ah, accroître les performances du salarié qu'un "patron" pourrait ainsi corvéer à merci sans que l'opprimé, pareillement décérébré, bronche...) cela même dont se nourrit l’exécration du plus grand nombre, bien sûr avec des exemples pareils, on ne peut que s'insurger contre le projet "transhumaniste".
Sauf que si on donne le choix à la majorité des gens entre l'impotence grandissante au fil des années suivant l'ordre soi-disant "naturel" et la possibilité de rester bien portant plus longtemps grâce aux "nouvelles technologies" honnies, je pense qu'ils opteront pour la seconde solution... Moi, en tout cas, en ce qui me concerne, je pense que je préférerai être réparée par les "nouvelles technologies" que de me voir me défaire et me pourrir davantage de jour en jour..
Mais je n'ai aucune envie pour autant de me faire greffer ma carte vitale sous forme de "puce sous-cutanée"... fût-ce pour faciliter la tâche des sauveteurs en cas d’accident grave (quoique, vu sous cet angle…) ou de me faire truffer de capteurs pour être en permanence connectée à un ordinateur qui régulerait toutes mes variables physiologiques à toute heure du jour et de la nuit sans que mon état justifie que je sois confinée sur un lit d’hôpital.
C'est toujours la même question: Où est la limite? Si l'on consent à l'implantation d'un pacemaker, alors pourquoi refuser la puce? Ou le neurone artificiel qui remplacera celui que la maladie d'Alzheimer a "bouffé"???

Et puis on oublie, dans ces polémiques qui brassent beaucoup de papier, que cette volonté d'être "plus" que ce que l'on est participe de ce que d'aucuns appellent la "nature humaine" (encore faudrait-il savoir ce que c'est: depuis qu'il existe la "philosophie", les réponses se sont multipliées, aussi variées qu'antagonistes et quiconque affirme être capable de cerner cette "nature humaine" est d'une outrecuidance à peine pensable). Les mythes et légendes sont remplies d'êtres immortels, incommensurablement forts ou habiles ou intelligents... autant de créatures qui ne sont rien autre que la "cristallisation" fabuleuse des aspirations humaines et dont on pourrait dire que l'ultime avatar est ce Dieu unique, omnipotent, et omniscient, origine indépassable de toute chose, être absolu, inatteignable. Mais que l’on prie et à qui on prête une "volonté" (décidément, on ne mesure jamais les incohérences: si Dieu est transcendance absolue, alors comment se fait-il que l'homme qui dit l'adorer et lui vouer un culte prétende dans le même temps le nommer - donc le "connaître" - et a fortiori le prier, lui demander quelque chose comme à son voisin de table??? )
Le véritable virage n'est pas dans cette aspiration au "toujours plus" qui fonde les actions humaines depuis qu'un grand singe s'est engagé dans le processus d'hominisation (au fait, sait-on ce qui a vraiment déclenché ce processus? On esquisse des réponses - amélioration et diversification de l'alimentation, qui a entraîné une augmentation du volume cérébral, station debout qui a elle-même eu d'autres conséquences évolutionnelles... mais ce sont plutôt des enchaînements de causalités, en aucun cas une "raison fondamentale; de même on peut décrire comment l'univers s'est développé à partir du Big Bang, sans savoir pourquoi le Big Bang est advenu - on tient une partie du "comment", en aucun cas le "pourquoi"). Donc, le virage n'est pas dans cette aspiration au "toujours plus" que certains assimilent à l'hybris des Anciens, mais en cela que les techniques mises au point par l'homme (oui, mises au point "par l'homme" qui donc restent "humaines"; parler d'au-delà de l'humain" n'a aucun sens: ces techniques émanant de l'homme elles restent humaines; ce qui est repoussé - nullement "franchi" si on veut bien se donner la peine de réfléchir trente secondes au sens des mots - ce sont certaines limites qui sont assignées à l'humain et, plus largement, au vivant. Je n'écrirai pas "par la nature" parce que la "nature", bien malin est qui saura la définir!) font aujourd'hui descendre dans la réalité concrète et quotidienne ce qui jusqu'alors restait cantonné au mythe.

De mon point de vue, que l'on croie poursuivre après la mort une vie "comme sur Terre", ou bien que l'on va éternellement "contempler la face de Dieu", ou encore combattre sans fin au Walhalla, ou gésir dans un paradis de lait et de miel avec n vierges pour compagnes, ça dit la même chose: une obstination à vouloir trouer la grande ténèbre que représente pour l'entendement "la mort"; une aspiration à la vaincre. Les progrès de la science ne visent qu'à concrétiser ce que les mythes racontent et bornent au récit, ces mythes en lesquels plus personne ne croit vraiment alors même que "la mort" comme d'ailleurs "la vie" en tant que principe, restent une ténèbre. Qu'est-ce que la mort, qu'est-ce que la vie, personne ne le sait parce qu'il est bien entendu que ni l'une ni l'autre ne peuvent se résumer à leur définition clinique (elle-même d’ailleurs non définitivement arrêtée, et toujours en redéfinition)...


Bref, le savoir humain n'est, au fond qu'une confrontation perpétuelle à l'Énigme, et si l'on n'avait pas tout au fond de soi ce désir de "toujours plus", donc de percer ces énigmes, eh bien, je crois que ce serait l'immobilisme, la vraie "fin de tout" bien plus que le Big Crunch... J'aime assez ce que disait Kirone Mallick l'invité de la Conversation scientifique d’Étienne Klein, sur France Culture, le samedi 7 février: en substance, que la science n'est en aucun cas une somme de vérités, que chaque découverte remet en cause une "vérité" précédemment admise et qu'il faut plutôt définir la science, toutes disciplines confondues et même les mathématiques réputées la plus "objective" de toutes (ne cesse-t-on pas de résoudre des équations insolubles, d'en développer de nouvelles qui vont elles-mêmes en engendrer d'autres?), comme une succession de "vérités émergentes" (c'est-à-dire vacillantes, et de nature à être sitôt bousculées qu'advenues). En gros, chaque fois qu'on répond à une question c'en est une autre qui surgit et ainsi de suite. Enfin, c'est ce que j'ai entendu, et cru comprendre. Il n'est pas exclu que je me sois méprise!


Pourquoi, au lieu de s'embarquer dans des discours creux, et pleins de vent même si certaines inquiétudes sont légitimes, ne consacre-ton pas plus de temps à s'émerveiller des ces surgissements incessants de questions? Pourquoi ne s'émerveille-t-on pas par exemple de ce que, après avoir cru percé le "secret de la matière" une fois découverte la composition des atomes censés être la plus petite brique de matière au-delà de laquelle on ne pouvait pas aller, on s'aperçoive qu'il y avait encore des mystères, des mystères qui, je crois, ne sont pas résolus maintenant qu'on a "vu" le boson de Higgs... Sans doute parce que la "matière" n'est pas l'alpha et l'oméga de l'être. Et celle-ci fût-elle dépouillée de ses secrets (encore faudrait-il admettre qu'elle puisse l'être, ce que dément la conception de la science définie par Kirone Mallick), l'être ne le serait toujours pas.

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  • : Terres nykthes
  • : Ce blog au nom bizarre consonant un rien "fantasy" est né en janvier 2009; et bien que la rubrique "archives" n'en laisse voir qu'une petite partie émergée l'iceberg nykthéen est bien enraciné dans les premiers jours de l'an (fut-il "de grâce" ou non, ça...) 2009. C'est un petit coin de Toile taillé pour quelques aventures d'écriture essentiellement vouées à la chronique littéraire mais dérivant parfois - vers où? Ma foi je l'ignore. Le temps le dira...
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  • Entre littérature et arts visuels, à la poursuite des ombres, je cherche. Parfois je trouve. Souvent c'est à un mur que se résume le monde... Yza est un pseudonyme, choisi pour m'affranchir d'un prénom jugé trop banal mais sans m'en écarter complètement parce qu'au fond je ne me conçois pas sans lui
  • Entre littérature et arts visuels, à la poursuite des ombres, je cherche. Parfois je trouve. Souvent c'est à un mur que se résume le monde... Yza est un pseudonyme, choisi pour m'affranchir d'un prénom jugé trop banal mais sans m'en écarter complètement parce qu'au fond je ne me conçois pas sans lui

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